Frontière Indo-pakistanaise, 31 juillet 2011

Je voulais aller à la frontière pakistanaise pour assister à la « cérémonie » militaro-loufoque de la fermeture de la frontière pour la nuit, avec pas de l’oie extrême à l’anglaise et grands claquements de semelles de soldats-soldates en uniforme kakis et couvre-chefs en tissus façon crête plissée rouge et jaune d’une bonne trentaine de centimètres de haut, exhortations patriotique de la foule en délire par un « MC » non seulement en civil, mais en survèt’ blanc!!! Même chose coté pakistanais, mais les couleurs sont plus noirs et vert que rouge et kaki.
Imaginez un demi-stade avec gradins des deux cotés de la route qui relie Amritsar à Lahore, divisé en différentes sections pour: le tout-venant indiens, hommes et femmes séparées (histoire de protéger les dames des pincements de fesses et tripotages en tout genre de la part de mâles indiens aussi frustres que frustrés); VIP indiens; VVIP indiens (si, si, ça existe, Very Very Important Persons); et touristes étrangers. Même chose encore coté pakistanais, j’imagine, quoique le peu d’attrait touristique du pays ces derniers temps devrait avoir rendu inutile la présence d’une section spéciale pour les routards et autres voyageurs étrangers. Pour des raisons d’organisation et de géopolitique, je n’ai vu de la représentation pakistanaise que la descente des drapeaux et quelques pas de danse aussi martiaux qu’impressionnant.
Les indiens ont commencé avec des femmes portant chacune un drapeau, faisant des aller-retour en courant d’un bout de la rue jusqu’à la barrière frontalière sous les acclamations de la foule en délire. Puis les soldats du « Border Security Force » nous ont gratifié de pas-de-l’oie du plus bel effet, à l’agressivité contenue mais plus qu’évidente.
Le charme de l’affaire c’est son coté martialo-surréaliste, avec patriotisme débridé des deux cotés de la frontière, musique pas seulement militaire mais pop/disco/patriotique (je sais, c’est difficile à concevoir, mais essayez…) et les danses qui vont avec (seuls les filles dansaient, si les boys avaient participer, ça les aurait beaucoup trop chauffé pour garder un décorum militaire, après tout)), mais je ne pouvais pas m’empêcher d’y voir une tentative de rapprochement entre les deux « frères ennemis » comme le veut la formule médiatique en vogue. Rapprochement bien court et léger, soit, mais quand même une bonne chose quand on pense que les deux ont beaucoup de Bombes à radiations, et qu’ils n’ont pas été loin de s’en servir en 1999, lors de leur dernière guerre…
Le gentil hôtelier m’avait dit que pour 800 roupies (une douzaine d’euros) j’aurais droit à un taxi climatisé perso pour moi tout seul, avec visite d’un temple de Durga multi centenaire avant la frontière, suivi d’un autre temple à la fin. J’ai dis banco!
Mais voilà, ce que dit le patron samedi n’est pas nécessairement la même chose que le sous-fifre va te vendre en fait le lendemain: pas de temple, et arrivé à la frontière avec deux heures d’avance.
Et c’est là que j’ai failli mourir.
Il faut comprendre que le concept « d’attendre son tour et y aller gentiment avec toute la courtoisie requise envers les autres dans la même file d’attente » est totalement étranger à l’Indien. Ici, c’est « chacun pour soi, moi d’abord, vite, vite, vite j’y vais, pousse toi et fuck you ».
Donc nous voilà quelque milliers de personnes à attendre que les grilles s’ouvrent. Quand je dis ’les’ grilles, c’est LA grille d’un passage d’un mètre cinquante qui s’est ouvert finalement, plus d’une heure avant la cérémonie.
Je vous laisse imaginer la situation quand plusieurs milliers de fous poussent pour passer par une petite porte devant laquelle se trouve de grosses pierre et bout de ciment qui sont censés ralentir l’avance de la foule, mais ne servent qu’à faire tomber ceux qui ne les voit pas, c’est-à-dire tout le monde.
Comme je connais mes indiens assez bien, je ne suis pas rester à l’arrière poliment, mais je me suis débrouillé pour être quasiment au dixième rang devant la porte, au milieu de dames en sari portant bébés et jeunes enfant dans leurs bras. Dés l’ouverture de la grille, c’est le chaos. Tout le monde pousse, les gens sont écrasés les uns contre les autres, certains tombent et sont rattrapés in extremis par leur voisins. C’est-ce qui m’arrive, écrasé contre une dame et son bébé que je retiens à un moment: si elle tombe c’en est fini pour elle et son enfant. Moi-même, je dois ma vie à un voisin que je ne connaitrais jamais qui me prend par le bras au moment je suis sur le point de perdre l’équilibre. Les dames hurlent de peur et de douleur, j’en vois qui saignent, les enfants sont paniqués, écrasés, ignorés…
Et puis je passe, et tout devient calme et les gens autour de moi sourient et avancent vers les gradins comme si rien ne s’était passé. Et je redeviens VIP en tant qu’étranger, j’ai droit à une entrée spéciale, on me mène à mon gradin, et comme je suis parmi les premiers, je suis tout en haut: bien pour avoir une vue plongeante, mauvais pour voir ce qui se passe à la ligne de démarcation et ce que font les pakistanais.
Donc, je n’ai pas vu les temples prévus, suis arrivé inutilement trop tôt puisqu’il aurait suffit d’arriver à la dernière minute pour éviter la foule et la mort, et me retrouver en bas au premier rang pour tout bien voir.
Plainte de Polizzi à l’hôtel en rentrant demandant à payer moins, vu que j’ai failli mourir, que j’ai mal vu ce pourquoi j’étais venu, qu’il n’y a pas eu les temples qu‘ont m‘avait dit, etc., … mais tiens, fume, la visite des temple était cadeau de la direction, donc aucune obligation, et puis après tout je suis vivant, donc tout va bien…
Bon, il ne me l’a pas dit comme ça, mais vous voyez le genre. Du coup, j’ai coupé court et suis retourné à Delhi le lendemain, après être passé au Temple d’Or le soir histoire de me plaindre en haut lieu et demandé aux mânes de gourous Sikhs de punir les méchants qui m’ont fait mal. On verra à la prochaine réincarnation si mes complaintes ont eu de l’effet. J’y crois pas trop, faudra que j’en parle à mon pote Shiva qui à de l’influence, même chez les Sikhs on me dit…
Le lendemain, le Pashim Express met huit heure à rejoindre Delhi, me coute plus cher que le Shatabdi de l’aller pour un service moins complet. Mais bon, y avait la clim’…!

India-Pakistan border, July 31, 2011

I wanted to go to the Pakistani border to witness the bizarre ceremony of « closing the border for the night». Permanent cement stands, stadium-like, have been erected on both sides of the border, giving the lucky patriots the chance to see their boys (and girls in India's case) in uniform and cocks-comb headdress strut and goose-step about with martial fervor and exaggerated aggressiveness. There are several sections for the crowd, the largest one for Indian males, and another for Indian " ladies» so as to protect said ladies from major gropes, pinching and assorted lascivious behavior from the more uncouth and frustrated young males, already high on a heavy adrenalin patriotic charge. There are two VIP sections, another for VVIP (yes, VERY, VERY, Important Persons!), and finally one for foreign tourists. From where I sat, I could only see the Indian side of things, only catching a glimpse or two of the Pakistani soldiers when they stepped in the center of the gate. But getting there almost got me killed. The hotel had the AC taxi pick me up at 4pm to get to the border at 5. The entry gate was closed, with a good five thousand Indian patriots chomping at the bit for the free show. At that point, everybody was smiling and well-behaved, so I managed to inch my way about ten feet from the gate in the middle of the impatient crowd. I'm home-free, I thought, I'll get me a front row seat for all that martial ardor! I had forgotten that when a gate opens and a starter yells "GO" to an Indian crowd, said crowd doesn't proceed calmly in disciplined order to its destination: it surges, charges, elbows its way, crushes all obstacles like a many-headed and -fisted and -legged Leviathan, unstoppable in its slow yet inexorable progress. There were two gates that could have been opened: a large one stopping traffic on the main road, and a small one for pedestrian, about five feet across, to the left side. Guess which they opened? As soon as the small gate clanged open, the throngs behind pushed forward and the crush was on. I was at first carried back and forth, right and left, without having to walk. But when a lady and child in front of me fell and I felt my feet come into contact with what tripped her, namely a large stone block, I knew things looked bad. there were actually several of these blocks near the gate, people were falling left and right, and still the beast behind us pushed and pushed! As I started to lose my balance, I felt myself grabbed by the arm and pulled upright. I never saw who saved me, but I thanked him anyway. I saw a woman bleeding from the head, everybody was shouting and screaming, the pushing never stopped, and all of a sudden.... I am through.... I look around me and see a handful of people who have also just made it past the gate. We all have the same nervous laugh looking at each other, some post-gallows mirth, I guess. After that, it all changes. People trickle in, and I have a good head-start toward the stands. Everything is quiet and still, only a long line of people moves calmly behind me. I follow the crowd and a soldier stops me and points me in another direction marked VIP. Mmmm, I like that. Another soldier looks at my passport, and I proceed to the next check-point where a few Indian couples of evident means and several western tourists wait to be directed to their seats. Being the first group, we're moved all the way to the top of the stands, which is fine for a plunging overview of the Indian side of the ceremonial, but the worst spot to see the Pakistani side of things. There are two corps that I can tell, the BSF or Border Security Force, and another army unit in different uniforms. The most striking are the ones wearing orange and red silk coxcombs headdress. But it starts with pairs of girls coming from the crowd carrying an Indian flag running towards the border and back. This lasts a good while. The person in charge is not a man in a uniform, but a tall hunk with a moustache that nearly dances and soft-shoes his way from the flag girls to soldiers at attention, from a nearby barrack to the front row of spectators where he shakes hands, points to "fans" in the crowds,... it's a regular variety show. Did I mention he wears a white jumpsuit, the cool looking one, like ultra hip athletes wear?! Then the military goose stepping, with choreographed threats and alpha-male challenges, goes on. Some of the high-stepping would have made John Cleese and the Ministry of Silly Walks proud! Then it ended, and we all filed out. I found my AC cab and made it back safely to the hotel. I figured I'd go one last time to the temple to see it up close again at night under the light, and to ask whomever's in charge to please thank the unknown fellow who pulled me upright at the right time!

 

 

       
       
       
       
       
       
       
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